Faire en sorte que les soins de santé soient accessibles, abordables et durables, aujourd'hui et pour les générations à venir, voilà ce que défend Medaxes. Et nous ne sommes pas isolés dans cette démarche. Notre invitation aux partenaires du secteur des soins de santé à réfléchir à ce sujet a été chaleureusement accueillie. Lors du Medaxes Day du 27/01/2023, quelque 120 parties prenantes ont discuté avec le Vice-Premier ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique Frank Vandenbroucke, le Dr Sarah Garner (WHO), Yannis Natsis (ESIP) et notre Wim Vervaet, à la recherche de meilleures pratiques, de nouvelles propositions, de modèles et de méthodes pour répondre de manière permanente à l'accès aux soins de base et spécifiques.
En effet, depuis plus de 20 ans, le secteur hors brevet contribue à fournir des soins accessibles et de qualité dans notre pays, et à créer une marge de manœuvre dans le budget des médicaments. Mais le modèle actuel de financement du budget des médicaments atteint ses propres limites. Nous devons oser discuter d'une réforme fondamentale de ce modèle de financement si nous voulons continuer à garantir l'accès à des soins de qualité à l'avenir également. Outre l'érosion des prix qui résulte de ce modèle, l'inflation met à rude épreuve la viabilité du secteur hors brevet. Il défie toute logique économique que, nos membres ne peuvent pas répercuter proportionnellement leurs coûts supplémentaires sur les prix des médicaments qu'ils commercialisent.
Medaxes appelle à une prise de conscience approfondie de la manière dont les médicaments hors brevet peuvent être utilisés au mieux pour l'accessibilité, la payabilité et la durabilité du système de santé. À court terme, Medaxes suggère d'accorder une exemption sur le ‘claw-back‘ (taxe dite ‘de récupération’) pour les médicaments hors brevet, de revoir les procédures d'adjudication à l’hôpital pour garantir la juste concurrence des biosimilaires, et en créant des conditions de concurrence équitables permettant d’augmenter la part de marché des médicaments génériques et biosimilaires. Une action urgente est nécessaire pour les biosimilaires, également dans le segment des officines publiques. À moyen terme, Medaxes appelle à un mécanisme de ‘contrôle’ au niveau méso dans la politique budgétaire des médicaments afin de garantir les soins de base et spécifiques, tel que Wim Vervaet l’a expliqué. Nos autres intervenants ont également souligné que les médicaments non brevetés sont une pierre angulaire du système de santé. Et que pour que les soins de santé restent accessibles à l'avenir, nous devons investir suffisamment pour que les médicaments génériques et biosimilaires arrivent et restent sur le marché.
En outre, une concurrence forte et saine doit être une priorité absolue pour les décideurs politiques, non seulement dans le cadre de la future révision de la législation pharmaceutique européenne, mais aussi dans le système de santé belge. Malgré la pression continue que les nouvelles évolutions thérapeutiques exercent sur le budget des médicaments, seul un environnement commercial durable pour le secteur hors brevet en Belgique peut garantir que ces médicaments trouvent leur chemin vers le marché.
Ces changements requièrent du courage et une vision et, surtout, des partenariats inspirants, pour maintenir, renforcer et étendre les fondations des soins de santé. Un budget des médicaments durable - et par extension des soins de santé durables – ne se gère pas comme un coût, mais s’entretient comme un investissement.
Jasmien Coenen, Managing Director
Le ministre Vandenbroucke, qui, il y a plus de vingt ans, a jeté les bases de la politique actuelle en matière de médicaments (‘bon marché’) avec l'introduction du remboursement de référence, admet que "nous sommes confrontés à un dilemme : le mécanisme de réduction des prix, qui a permis de réaliser des économies importantes à l'époque, fait aujourd'hui obstacle - en raison de sa complexité accrue - à un marché concurrentiel, la pression constante sur les prix entraînant des problèmes de durabilité".
Bien que le ministre estime que "des réductions de prix continueront à faire partie de la boîte à outils", il indique que "nous avons besoin d'un ’reset’ dans une optique de durabilité et d'accessibilité financière, dans laquelle la concurrence joue un rôle".
"Dans le cadre du budget des médicaments, nous devons cesser de considérer les médicaments hors brevet qui fournissent des soins de base à tous les citoyens d'une part et les médicaments innovants qui se concentrent principalement sur les 'besoins médicaux non satisfaits' d’autre part comme des vases communicants. Le mantra selon lequel les prix plus bas des médicaments dans le segment hors brevet garantissent l'accès aux médicaments a clairement dépassé sa date de péremption", affirme Wim Vervaet.
"Les payeurs doivent changer leur fusil d'épaule et investir dans une utilisation maximale des médicaments hors brevet pour optimiser les dépenses de santé. Plus précisément, cela signifie qu'il faut opter pour des prix durables plutôt que des prix cassés, pour le ‘meilleur’ achat (lire la meilleure option thérapeutique) plutôt que pour l’achat qui a le moins d'impact, pour une concurrence saine plutôt que pour des baisses de prix récurrentes (érosion des prix) et pour un approvisionnement durable plutôt que des pénalités pour indisponibilité."
Yannis Natsis, directeur de l'ESIP considère que la concurrence (ou du moins son absence) est le défi que doit relever la politique actuelle et future en matière de médicaments pour contribuer à des soins de santé durables.
"Toutefois, nous constatons deux tendances inquiétantes, notamment les données manquantes ou l’'évidence gap' croissant ('manque croissant de preuves') dans l'approbation des brevets de la plupart des nouveaux médicaments et l'’orphanisation’ de l'environnement réglementaire'.
"En outre, il faut s'attaquer non seulement au problème des prix élevés de l'innovation, mais aussi à celui des prix bas (dans le cas des médicaments génériques et biosimilaires). Les retraits du marché encouragés par les prix bas entraînent également des problèmes d'accessibilité."
>>> Durabilité des soins de santé : la concurrence est la solution
En ce qui concerne les médicaments essentiels à des prix abordables, le Dr Garner souligne l'importance des partenariats et fait remarquer qu'"une industrie pharmaceutique forte, tant pour les médicaments innovants que pour les médicaments hors brevet, est nécessaire pour atteindre les objectifs de santé".
Alors que les gouvernements européens s'inquiètent de plus en plus des coûts élevés qui entravent l'accès à de nouveaux médicaments potentiellement efficaces, l’Oslo Medicines Initiative (OMI) a vu le jour en 2020 dans le giron de la division européenne de l'OMS.
De plus, "l'OMS a une forte tradition de reconnaissance des médicaments biosimilaires et génériques, avec plus de 200 médicaments génériques faisant partie de la liste des médicaments essentiels, qualifiés de médicaments de qualité et de médicaments de base", ajoute le Dr Garner.