Et pourtant la semaine passée, une nouvelle histoire a surgi sur les réseaux sociaux, selon laquelle les conteneurs de PMC, de papiers-cartons et des immondices ont été déversés en fin de parcours dans le même tas, sans plus aucun tri. Le tout s'est passé dans une gare ferroviaire. On peut aisément deviner la suite...
Depuis vingt ans le Belge est encouragé à rapporter ses médicaments non utilisés ou périmés à son pharmacien de confiance. Lors du nettoyage de la pharmacie familiale, on sépare ainsi d'abord consciencieusement les boîtes d'emballages et les notices des blisters et tablettes. On remet alors ensuite au pharmacien le petit sac de pilules périmées, les tubes et flacons contenant des restes de médicaments. Le pharmacien les regroupe dans une boîte spécialement prévue à cet effet et les remet à son tour à son fournisseur. Le patient s'en retourne à la maison le cœur léger, convaincu d'avoir accompli une bonne action.
La réalité est plutôt dérangeante : en effet, les médicaments ainsi collectés sont en réalité transportés vers un simple incinérateur... où ils sont traités (entendez incinérés) avec les ordures ménagères. Rien n'est trié (ni recyclé) en bout de chaîne donc. D’un point de vue environnemental, le fait qu’en 2017 les médicaments périmés et non utilisés soient incinérés avec les déchets ménagers dans les mêmes installations ne devrait d’ailleurs avoir rien de surprenant : les médicaments périmés ou non utilisés provenant des ménages ne sont en eux-mêmes pas plus dangereux que le reste des autres déchets ménagers. Le catalogue européen des déchets est d’ailleurs très clair à ce sujet.
Il y a vingt ans, les cartes étaient bien différentes. Une fraction importante des déchets ménagers était alors encore mise en décharge, au lieu d’être incinérée. Avec tous les risques inhérents de contamination du sol et, ici et là, de pauvres misérables qui écumaient ces décharges. A cette époque, il y avait donc de bonnes raisons d’organiser séparément la collecte des médicaments périmés ou non utilisés.
En premier lieu pour l’environnement lui-même. Car la collecte sélective telle qu’organisée aujourd’hui entraîne finalement une plus forte empreinte sur l’environnement (transport vers le pharmacien, boîtes spéciales, stockage intermédiaire chez le fournisseur, transport séparé vers le four d’incinération).
Le citoyen peut pourtant, sans aucun souci pour l’environnement et la conscience tranquille, appliquer le même traitement à ses médicaments périmés et non utilisés qu’à ses déchets ménagers : trier les emballages et les notices avec les vieux papiers, les flacons vides vers les bulles à verre et le reste vers le sac gris ménager. La suppression de la collecte sélective des médicaments mettrait du même coup aussi un terme aux abus en la matière : il ressort en effet systématiquement des contrôles opérés à partir d’échantillons qu’au moins un tiers des déchets qui aboutissent dans ce circuit n’ont en fait rien à voir du tout avec les médicaments. Et soyons de bons comptes : cette collecte sélective des médicaments entraîne pour le secteur à la fois dépenses supplémentaires et tracas financier. Des moyens qui pourraient être bien mieux utilisés, à l’avantage du patient.
“Mais ne serait-il pas alors tout de même sensé de collecter sélectivement ces médicaments non utilisés dans un but humanitaire ?”, vous demandez-vous. A première vue, cela semble en effet une idée louable, mais la réalité invite à y réfléchir à deux fois. Car une fois qu’un médicament sort d’une armoire à pharmacie, plus aucune garantie n’existe quant à sa qualité : a-t-il bien été conservé comme il se doit ? A la bonne température ? N’a-t-il pas atterri dans de mauvaises mains ? Etc., etc. Et que faire alors par exemple des tubes de pommade à moitié utilisés ? L’expérience nous a aussi enseigné que pour de telles initiatives humanitaires – aussi bien intentionnées soient-elles – les risques sont bien plus importants que les avantages. C’est pourquoi aussi bien l’Organisation mondiale de la santé que la législation formelle vont dans la même direction et déconseillent – à raison – ce type de systèmes.
Le plus grand défi pour les soins de santé consiste à garder ceux-ci accessibles pour chacun. Cela signifie entre autres que chaque euro qui y est consacré doit être dépensé de la manière la plus coûtefficace possible. Le bon usage des médicaments en fait partie intégrante. C’est là que nous devons investir nos moyens, encore plus que ce n’est déjà le cas aujourd’hui. Le pharmacien doit continuer à y jouer un rôle important. Mais stoppons simultanément des activités qui ont certes montré une utilité dans le passé, mais qui ne font aujourd’hui plus qu’entretenir des illusions.
Joris Van Assche
Administrateur délégué FeBelGen
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